dimanche 1 décembre 2013

Zone de gratuité : Comment les objets deviennent « sans propriétaire fixe » ?

Et si on changeait notre rapport à la propriété et à la consommation ? 

Un peu partout en France émergent des « zones de gratuité », des espaces où les rapports marchands sont abolis, de manière temporaire ou permanente. Ici les objets circulent et les gens se parlent, en réapprenant que l’échange ne passe pas forcément par l’argent. 

Petit reportage à Montreuil (Seine-Saint-Denis). 


Tout l’après-midi, les tables se vident et se regarnissent. Les objets restants en fin de journée seront amenés dans les locaux voisins du Secours populaire. Des groupes de musique se succèdent sous des barnums prêtés par le comité des fêtes de la Maison de quartier. Un bar gratuit offre boissons, radis bio, pain et confiture – selon les arrivages. Les enfants se pressent à un atelier peinture, autour d’une construction en plastique ou de vélos recyclés.

« Tout est vraiment gratuit ? », questionne un enfant, incrédule. Dans cette rue de Montreuil, une centaine de personnes discutent, se promènent ou explorent des piles d’objets entassés sur une dizaine de tables. La rue de Villiers est déclarée « zone de gratuité » pour tout l’après-midi. Sur les tables : vêtements et chaussures, livres et DVD, vaisselle, ordinateurs ou chauffe-biberon... Ici, chacun amène ce qu’il veut et prend ce qu’il souhaite. Tout est en accès libre. Ce n’est pas une brocante ou un vide-grenier, mais un espace non-marchand temporaire.

Ce projet est né il y a quelques années. « Lors d’un repas de quartier, nous avons lancé l’idée avec des copains, les voisins de la rue, explique Vito, l’un des organisateurs. Au début, certains n’y croyaient pas. Mais voilà, nous en sommes à la 4e édition. » « C’est une idée super simple à mettre en œuvre, décrit Samantha. Il suffit juste de demander à la Mairie que la rue soit fermée. » La différence avec un vide-grenier ? « Chacun peut déposer des objets à offrir ou proposer des services. Chacun peut prélever ce qui lui fait envie. L’idée, c’est de partager. L’idée, c’est de se rencontrer », proclament les affiches, placardées dans toute la rue.

Un pied-de-nez à la société de consommation

Andres est venu d’une rue voisine, avec sa famille. Ses filles n’ont rien trouvé d’intéressant. Lui a vidé une valise entière. Il souhaiterait que l’initiative ait lieu plus souvent. « On a amené beaucoup de choses. Ça part mieux qu’à un vide-grenier ! », sourit une autre participante. Plus facile de se débarrasser des objets qui n’ont plus d’utilité, pour leur offrir une deuxième vie. « Et comme c’est gratuit, on hésite moins à emporter des objets. » Sa fille semble toute contente du serre-tête rose qu’elle vient de dénicher. 

Donner et récupérer à la place d’acheter et jeter

Ni troc, ni obligation de réciprocité, ni charité, la zone de gratuité est un moyen utile de réduire le volume de déchets et de recycler les objets. Une façon aussi de se réapproprier l’espace public, la rue, de créer un moment convivial, entre voisins et ouvert à tous. Un pied de nez à la société de consommation. Un espace soustrait aux rapports marchands, qui vient interroger chacun sur le don, l’argent, la propriété. « Les valeurs Acheter - Jeter sont remplacées par les joies du Donner - Récupérer », expliquaient les organisateurs lors de la première édition.

Tout l’après-midi, les tables se vident et se regarnissent. Les objets restants en fin de journée seront amenés dans les locaux voisins du Secours populaire. Des groupes de musique se succèdent sous des barnums prêtés par le comité des fêtes de la Maison de quartier. Un bar gratuit offre boissons, radis bio, pain et confiture – selon les arrivages. Les enfants se pressent à un atelier peinture, autour d’une construction en plastique ou de vélos recyclés.
 

Ces zones de gratuité essaiment un peu partout en France et dans le monde. Zones temporaires ou permanentes, sur un bout de trottoir, dans des locaux d’une association, dans une cage d’escalier ou par un caddie gratuit laissé au bord d’une route. Certaines fonctionnent sur le don définitif, d’autres invitent à faire circuler les objets, devenus SPF (Sans propriétaire fixe). Dans d’autres lieux, on imagine des « zones d’objets mutualisés et empruntables » (ZOME), où les objets peuvent être empruntés, ou achetés collectivement pour être ensuite utilisés par tous. Des lieux qui invitent à renverser notre rapport à la propriété et à la consommation. Tout en répondant à un besoin urgent et concret, par ces temps de crise. A Montreuil, ils sont aussi nombreux à venir profiter de ces produits qu’ils ne peuvent se permettre d’acheter. Au bout de la rue de Villiers, deux femmes arrivent en vélo. « C’est bien ici la zone de libre-échange ? » demande l’une d’elles. Une zone, en tout cas, qui bouscule nos imaginaires.


Source : Article d'

- Un répertoire des zones de gratuité- A Courçon (Poitou-Charentes)
- Dans le Royans (Rhône-Alpes)
- Dans le Morbihan
- A Brest
- A Rennes
- A Grenoble


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